Podcast à hauteur d’enfant : La motricité libre

24 Oct 2025 | Pédagogie

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Q : Aujourd’hui, nous retrouvons Caroline, responsable de la crèche de Perpignan, pour parler d’un thème au cœur de nos pratiques professionnelles et qui suscite souvent des interrogations chez les parents : la motricité libre.

Pourquoi ce terme revient-il si souvent ? En quoi est-ce bénéfique pour les bébés ? Et comment la mettre en pratique au quotidien, à la maison comme en crèche ?

Caroline va tenter de répondre à toutes ces questions !

Caroline : Bonjour à toutes et à tous, je suis ravie d’être avec vous aujourd’hui pour parler de ce sujet qui me passionne et qui anime notre quotidien à la crèche.

Q : Caroline, pour commencer, peux-tu nous expliquer ce qu’on entend par “motricité libre” ?

Caroline : Bien sûr. La motricité libre, c’est la liberté donnée à l’enfant de bouger, d’explorer et de développer ses compétences motrices à son rythme, sans qu’on lui impose des postures qu’il ne peut pas prendre seul.

Cela veut dire qu’on ne va pas l’asseoir s’il ne sait pas le faire tout seul, ni le mettre debout ou dans un trotteur pour “aller plus vite”. On part du principe que chaque enfant est capable, et que notre rôle, c’est d’aménager un environnement sûr et stimulant, sans forcer les étapes.

Q : D’accord, donc c’est vraiment une question de posture d’adulte ?

 

Caroline : Exactement. Et c’est une posture volontaire. On pourrait croire qu’on “ne fait rien”, mais c’est tout le contraire : on observe, on accompagne, on propose, mais on ne précède pas l’enfant.

On fait le choix de la confiance. Et cette confiance, elle se transmet à l’enfant

Q :  Est-ce que c’est une idée récente ? Ou ça a des racines plus anciennes ?

Caroline : C’est une approche qui existe depuis longtemps, mais qui a été formalisée par Emmi Pikler, une pédiatre hongroise, dans les années 60.

Elle a travaillé dans un orphelinat où elle a observé que les enfants laissés libres de leurs mouvements développaient une motricité stable, fluide… mais aussi une grande confiance en eux.

Depuis, les recherches en neurosciences ont confirmé ce qu’elle avait intuité : quand un enfant est acteur de ses mouvements, il intègre mieux ses compétences, et cela renforce aussi son estime de soi.

Q : Justement, en quoi c’est bénéfique pour le développement de l’enfant ?

Caroline : Les bienfaits sont très nombreux :

  • Sur le plan moteur, l’enfant muscle son corps de façon naturelle, globale, harmonieuse.
  • Sur le plan psychique, il prend confiance en ses capacités, il fait des choix, il apprend à gérer le risque.
  • Et sur le plan émotionnel, il est plus serein, car il sent qu’on lui fait confiance.

Un enfant qui se retourne seul, qui se redresse quand il est prêt, est un enfant plus stable et plus sûr de lui. Parce qu’en laissant l’enfant faire, on lui montre qu’on croit en lui. Et cela nourrit une confiance mutuelle très forte.

Q : Et si on le laisse faire, il ne va pas “prendre du retard” ?

Caroline : C’est une inquiétude fréquente, et compréhensible. Mais en réalité, chaque enfant a son propre rythme.

L’important n’est pas d’aller vite, mais de passer chaque étape en sécurité, en confiance et avec plaisir.

Un enfant qui tient assis seul est un enfant qui ne tombera pas dès qu’on se retourne.

Et un enfant qui marche sans qu’on le tienne par les bras a acquis l’équilibre et l’envie d’y aller.

Et bien sûr, si vous avez des doutes sur le développement de votre enfant — par exemple, s’il ne cherche pas du tout à se retourner, ou si vous sentez quelque chose qui vous inquiète, n’hésitez pas à en parler à votre médecin ou pédiatre.
Il pourra vous orienter vers un professionnel comme un kiné ou un psychomotricien.
Parfois, une simple évaluation suffit à vous rassurer. L’essentiel, c’est de ne pas rester seul avec vos questions.

Q : Concrètement, comment on peut favoriser la motricité libre chez soi ?

Caroline : Pas besoin d’avoir beaucoup de matériel ! Il suffit de :

  • Privilégier le sol : un tapis ferme.
  • Éviter les équipements qui “enferment” : transats prolongés, trotteurs, arche d’éveil, parcs trop remplis.
  • Laisser des objets à portée de main, adaptés à l’âge.

Et surtout : observer sans intervenir trop vite.

Et ce qui est important aussi, c’est de respecter les temps de calme. Un bébé qui ne bouge pas est souvent en train d’intégrer, de préparer quelque chose.

Q : Quand on parle d’observer l’enfant… on observe quoi exactement ?

Caroline : On observe ses initiatives spontanées : est-ce qu’il tente de se tourner ? Est-ce qu’il regarde un objet sans oser aller vers lui ? Est-ce qu’il tente un mouvement nouveau ?
C’est en observant qu’on peut lui proposer ce qui va l’accompagner, sans le forcer.
Par exemple : s’il tente de se retourner, on peut mettre un objet coloré à côté de lui, sans le lui mettre dans la main.
Et surtout : on observe sans juger. Pas de “il ne sait pas encore…”, mais plutôt “il est en train d’apprendre”.

Q : Tu nous as parlé du tapis au sol, mais as-tu d’autres conseils pour aménager un espace motricité chez soi ?

Caroline : Oui ! Voici quelques idées simples :

  • Créer un coin calme, sécurisé, sans passage fréquent.
  • Varier les textures : tapis, dalles en mousse, petit coussin.
  • Laisser à disposition quelques objets du quotidien (boîtes, cuillères, foulards).
  • Éviter de surcharger l’espace : trop de jouets peut bloquer l’envie de bouger.

Le message : moins mais mieux. Ce n’est pas la quantité, mais la liberté d’accès qui compte.

Q : Et quand il y a des frères et sœurs plus grands à la maison, ce n’est pas plus compliqué ?

Caroline : Si, parfois. Il faut aménager un coin vraiment dédié au plus petit, en expliquant aux aînés que ce tapis est “le sien”, qu’il apprend avec son corps.
Et souvent, les plus grands adorent “montrer” au petit. C’est une belle occasion de valoriser ce lien, à condition que ce ne soit pas intrusif.
Chacun a besoin d’un espace adapté à ses besoins.

Q : On parle surtout des bébés… mais la motricité libre, ça continue après ?

Caroline : Oui, bien sûr. La motricité libre ne s’arrête pas quand l’enfant marche.
Dans les sections de moyens ou de grands, cela veut dire laisser grimper, sauter, tester des équilibres… Prendre la toboggan à l’envers !
On ne freine pas l’exploration “par peur qu’il tombe”. On sécurise l’environnement, mais on ne retire pas le défi moteur.
C’est aussi une étape très importante pour la gestion du risque, l’assurance corporelle, la capacité à se relever.

Q : Et si on a découvert cette notion tardivement ? Est-ce “trop tard” ?

Caroline : Jamais ! Il n’est jamais trop tard pour faire évoluer sa posture.
Même un enfant qui a été très contenu, ou qui a eu un trotteur peut vivre la motricité libre ensuite.
Ce qui compte, c’est d’adapter l’environnement, de lâcher le “il faut qu’il sache faire” et de revenir à : “qu’est-ce qu’il tente de faire en ce moment ?”
Le corps de l’enfant est incroyablement adaptable. Et la confiance se construit à tout âge.

Q : Et si un enfant ne veut pas bouger ? On ne l’aide pas ?

Caroline : On l’aide… autrement.

On lui propose un environnement qui donne envie : un jouet intéressant, un objet à attraper, une surface douce pour pivoter.

Mais on n’impose pas. Un enfant qui ne bouge pas est parfois simplement en observation active. Il apprend déjà beaucoup.

Q : Et à la crèche, comment vous mettez cela en place ?

Caroline : C’est un pilier pédagogique pour nous.

Dans les espaces de vie des bébés, les enfants sont installés au sol dès l’accueil. Jamais dans une posture qu’ils n’ont pas acquise seuls.

Les espaces sont pensés pour leur permettre de rouler, ramper, pivoter, s’agripper, grimper.

Les professionnelles observent beaucoup, nomment ce que fait l’enfant, et sont là en soutien si besoin.

Chaque enfant évolue à son rythme, dans un cadre sécurisé mais stimulant.

Q : J’ai vu une fois un bébé qui prenait son repas… dans les bras ! C’est lié à la motricité libre ?

Caroline : Très bonne remarque ! Oui, tout à fait. À la crèche, nous proposons le repas dans les bras si l’enfant n’est pas encore capable se mettre assis seul en toute sécurité.

Ce geste est plein de sens : On respecte sa posture naturelle, on favorise le lien affectif, et on ne le pousse pas à “tenir assis” juste pour passer à table.

Et souvent, ce moment dans les bras est aussi un temps de réassurance, surtout les premières semaines.

Q : Pourquoi, selon toi, on entend autant parler de la motricité libre aujourd’hui ?

Caroline : Parce qu’on comprend mieux les besoins profonds des enfants.

On sort d’une logique de “performance” pour aller vers une logique de respect du rythme et de sécurité intérieure.

Et aussi parce qu’on a tous envie d’un accompagnement plus doux, plus juste, plus respectueux du développement naturel de l’enfant.

Conclusion

Q : Merci Caroline pour tous ces éclairages passionnants sur la motricité libre. Faire confiance à son enfant, c’est lui donner la liberté d’apprendre par lui-même… tout en restant à ses côtés.

Caroline : Exactement. Et j’aimerais dire aux parents : faites-vous confiance aussi. Observez votre enfant, aménagez son espace, et surtout… savourez ses progrès, petits ou grands.

Q : Merci à vous d’avoir écouté ce nouvel épisode d’« À hauteur d’enfant ». Ce qu’on peut retenir aujourd’hui, c’est que la motricité libre n’est pas une méthode rigide, mais une véritable posture éducative : elle repose sur la confiance, le respect du rythme de chaque enfant, et la création d’un environnement adapté qui lui permet de découvrir par lui-même.

C’est en le laissant expérimenter, tomber, recommencer… que l’enfant construit non seulement sa motricité, mais aussi sa confiance en lui, son autonomie et sa sécurité intérieure.

À la crèche comme à la maison, la motricité libre peut se vivre au quotidien, dans des choses simples : un tapis au sol, une attention bienveillante, et surtout… du temps.

Alors faites-vous confiance, faites-lui confiance… et savourez tous ces petits pas, parfois discrets mais toujours précieux.

On se retrouve très bientôt pour un nouvel épisode.

D’ici là, prenez soin de vous… et de vos tout-petits.

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